Tous si différents

En ces temps marqués par la surinformation, la spécialisation professionnelle et l'accroissement des inégalités, nous devenons probablement de plus en plus différents les uns des autres.

En avons-nous réellement conscience? Peut-être pas assez.

D'autant plus que, enfants déjà, notre milieu familial pouvait être plus ou moins accueillant, à l'abri du besoin ou non, avec des travers psychologiques divers, ou marqués par des jeux de pouvoirs parfois très malsains.

Notre passé forge notre personnalité.

Les connaissances acquises nous aident à voir plus clair en nous et dans le monde.

Mais clairement, nous ne sommes pas égaux devant la pyramide de Maslow, (voir figure) et nous nous sentons plus ou moins bien dans la société des humains.

Or souvent, quand nous nous adresson à l'autre, nous n'avons pas conscience de toutes ces différences, et des difficultés qu'elles entrainent pour bien nous comprendre.

Il y a probablement beaucoup plus de malentendus dans nos conversations que nous ne le pensons, et quand nous nous mettons en colère, peut-être que nous ne comprenons pas que le problème pourrait venir précisément d'un malentendu.

En même temps, peut-être pouvons-nous nous réjouir d'être si différents, car cela montre en tout cas que nous sommes uniques...

Sauf... que nous pourrions être beaucoup moins différents et tout de même nous ne pourrions être qu'uniques.

Jean-David Roth

Si j'aborde ce sujet, c'est parce que je pense profondément que l'accès au bonheur et à la liberté, dépend en premier...

  • de la richesse ou la pauvreté de notre monde intérieur
  • de ce que nous faisons de notre propre vie,
  • de l'image que nous avons de nous-même, donc notre perception de nos réussites et de nos échecs, qualités et défauts, pouvoir ou incapacité d'avancer

...toutes choses qui sont individuelles, nous sont propres, donc.

 

Jean-David Roth

 

 

Mais toujours en parlant de sentiments de bonheur et de liberté, je pense qu'ils ont une 2ème composante, moins individuelle, donc du coup plus collective qui nous vient de notre instinct grégaire, que nous partageons avec beaucoup d'autres animaux :

  • Sentiment d'appartenir à une communauté d'êtres vivants
  • Besoin de voir notre travail reconnu et considéré
  • Impression que l'humanité dans son ensemble fait ce qu'il faut pour améliorer toutes les choses.

Si je parle de cette dimension plus collective, c'est parce que j'observe aussi toutes ces infrastructures que nous avons mises en place, avec des lois, de l'argent comme monnaie d'échange, une possibilité d'accéder au monde du travail, de former ou non des couples et faire des enfants, de prier dans des lieux de cultes au nom de telle ou telle religion, d'avoir des armées pour garantir notre sécurité ou étendre notre pouvoir...

 

Jean-David Roth

 

 

 

Ces infrastructures...

  • selon que nous en sommes satisfaits ou non,
  • qu'elles nous aident ou non
  • que nous arrivons a les utiliser pour notre intérêt personnel et notre développement personnel lui aussi, ou non

peuvent contribuer justement

  • à notre sentiment de bonheur et de liberté,
  • à notre sentiment d'appartenance à la communauté
  • ou au contraire à une impression d'être en dehors d'elle, ou rejeté par elle.

Et comme cette manière de vivre ensemble, et les infrastructures mises en place au fil des siècles et des progrès, ont été la conséquence de ce que des individus ont pensé, produit et construit, sur la base d'idées, car tout commence toujours par des idées, individuelles d'ailleurs puisque ce n'est que dans un cerveau humain individuel qu'une idée peut éclore, semble-t-il, j'ai envie de parler de local et de global pour souligner que les deux, l'individuel et le collectif, sont intimement liés.

 

Jean-David Roth

 

 

 

Ces grandes infrastructures qui nous servent de cadre de vie (écoles, banques, entreprises, hôpitaux, armée, internet, etc.) jouent aussi un rôle très important pour la manière dont nous nous sentons par rapport à la liberté et le bonheur.

Mais voilà, ces infrastructures :

  • Sont-elles mises au service de tous?
  • Sont-elles perçues comme l'étant?
  • Et tous les utilisent-ils de manière  optimale?

Nous vivons dans le même monde.

Mais le monde que chacun perçoit n'est pas le même.

Et nos destins parallèles avancent ainsi cahin-caha, se dépatouillant du mieux possible dans nos sociétés, et ces infrastructures.

Qui organise toutes ces actions? Ne sont-elles pas au final le fruit d'une grande machine qui avance sans trop savoir comment ni pourquoi ni dans quelle direction, de manière plutôt court-termiste quand elle a un semblant de "vision"?

Jean-David Roth

 

 

Pour en revenir à toutes ces différences entre nous, dont je parlais au début, elles ont pour conséquences que nous gaspillons beaucoup d'énergie à nous disputer, à essayer de nous convaincre que c'est nous qui avons raison et que les autres ont tort, à défaire ce que les autres font et voir ce que nous faisons être défait par les autres.

Luttes politiques, des classes, des religions, des grands principes, nous nous regroupons en églises, pays, partis politiques, et communautés d'idées, professions, détenteurs de tel ou tel savoir, pour, le plus souvent gaspiller notre énergie à nous tirer dans les jambes.

Et en plus, les entreprises, personnes dites "morales" dans le jargon juridique, un peu mal-à-propos, cohabitent à nos côtés avec comme une sorte d'existence propre, ayant, comme nous, comme premier but leur simple survie, qui, dans leur cas, les inféode aux lois du profit et du marché.

Jean-David Roth

 

 

 

Et la CNV dans tout cela?

J'y viens.

Il faut retenir que la plupart du temps, les tenants de la cnv disent qu'elle est là pour faire progresser les gens au plan individuel, que si les gens changent individuellement, alors cela aura peut-être pour conséquence que la société et les infrastructures vont changer.

Je suis tout à fait d'accord avec cela.

Mais je pense en plus que le changements des infrastructures est aussi une voie riche à explorer.

Les chantres de la cnv ne prennent pas souvent parti sur ce point, mais il leur arrive de le faire, dans un sens ou dans l'autre, donc :

  • soit pour dire que l'élément individuel est de loin le plus important, le seul dont la cnv s'occupe.
  • soit pour dire, comme moi que les infrastructures influencent l'individuel peut-être autant que l'individuel influence les infrastructures et le collectif. Et que d'ailleurs, si la cnv se répandait davantage dans le monde, cela influerait sur nos manière de vivre ensemble à d'autres échelles également.

Tout ce que je dis ici concerne plus la question de "Quel monde voulons-nous mettre en place" qu'une explication de ce qu'est la cnv.

J'en suis bien conscient.

Toutefois, si les gens sont intéressés par la cnv, c'est souvent aussi avec l'idéal de faire diminuer la violence, qui rejoint la question du monde que nous voulons mettre en place.

S'il y avait une chose à retenir sur cette page, une chose qui concerne véritablement votre position de personne voulant pratiquer la cnv à petite ou grande échelle, c'est celle-ci : il faut, quand on pratique la cnv tout à la fois :

enquêter : partir d'un problème soulevé, l'examiner, le discuter, écouter, le relier au ressenti et aux besoins, selon le processus.

Laisser la personne accompagnée trouver elle-même les réponses qu'elle cherche, en utilisant la méthode, le processus.

Même si, à nous des solutions nous semblent évidentes et que nous aimerions les mêler à la conversation, il faut probablement ne pas le faire : car ce faisant, on tendrait à déposséder la personne qui a le problème au départ de la solution qu'elle cherche et qu'il vaudrait mieux qu'elle trouve elle-même. On risquerait de plus d'amener la discussion sur un terrain plus philosophique.

Par contre dans le processus de la cnv, prendre conscience des différences entre les gens, et en comprenant qu'elles sont plus grandes, bien souvent que nous ne le pensons, nous pouvons lier cela, un peu comme un procédé mnémotechnique, à la pratique du retour empathique, qui fait partie du processus de la cnv.

Il s'agit des retours, des reformulations résumées que nous faisons de ce que l'autre dit, qui lui permet de voir si nous l'avons bien comprise.

Donc l'équations serait :

Comme nous sommes si différents, pour se comprendre, il faut vérifier que ce que nous pensons avoir compris est bien ce que l'autre a voulu dire, en utilisant nos mots, (pas en répétant mot à mot ce que l'autre a dit comme le ferait un perroquet).

Cette pratique tout à la fois aide l'autre à faire une sorte de synthèse, et à prolonger ensuite sa pensée.

La pratique de la cnv, que je ne maitrise absolument pas, veut qu'il y ait dans les échanges de notre part des choses comme :

  • Et donc si je comprends bien, ce que tu as voulu dire c'est que...
  • Et quand tu dis cela qu'est-ce que tu ressens?
  • Et quand tu dis cela quel besoin est peut-être en train de s'exprimer en toi?
  • Comment te sens-tu?

Le plus souvent, la cnv, lors d'un accompagnement cnv, est utilisée par la personne accompagnée pour tenter de résoudre un problème relationnel (avec son conjoint, son enfant, ses collègues de travail... ).

Il y a alors un double travail à faire :

  • débroussailler ce qui se passe pour la personne accompagnée, et qui fait qu'elle vit mal ce problème relationnel
  • lui apprendre comment elle-même devrait mener un travail d'enquête un peu du même type avec son conjoint / enfant / collègue(s) / ami(es)... et c'est sur ce point que la notion de malentendu me semble primordiale, et c'est pour cela que j'ai voulu parler des différences entre humains, un peu à toutes les échelles, alors que j'aurais peut-être du me cantonner à le discuter au niveau d'une relation entre 2 personnes, puisque c'est souvent de cela qu'il est question et que l'on voudrait améliorer.

Pour en revenir aux généralités, je finirai en disant que plus récemment d'ailleurs, je me suis penché sur le concept de convergence, pour appeler de mes voeux les gens à tenter de converger pour amenuiser les différences entre les gens, par exemple en réfléchissant au 10 principes qui leur sembleraient les plus essentiels à défendre. En tout cas ce qui me rassure, c'est que tout le monde semble d'accord pour dire qu'un monde dans lequel il n'y aurait plus de guerres et dans lequel tout le monde mangerait à sa faim est souhaitable. Peut-être moins de monde ont tendance à penser qu'il faudrait lutter davantage contre l'accroissement de la population mondiale, dans le but de diminuer les nuisances écologiques qu'elle cause et rendre un peu de l'espace qu'elle prend aux autres espèces, tant animales que végétales.

Sauf peut-être dans le cas des cercles restauratifs qui ont été portés à mon attention par Dominic Barter qui les a développés au Brésil.

Il s'agit, pour le dire en deux mots, de tentatives de mettre ensemble des victimes et des perpetreurs de violence, ainsi que leurs familles, pour laisser à tour de rôle la parole à chacun pour qu'il s'expriment dans le cas d'une affaire qui serait plutôt une affaire dont la justice aurait à s'occuper. Cela peut aussi très bien avoir lieu à l'école suite à de petits problèmes de cour de récréation.

L'idée est de confronter les victimes et leurs bourreaux pour permettre davantage de prise de conscience, ce qui mène à plus de remise en question, et se termine par une discussion sur la réparation que les bourreaux pourraient envisager de faire, qui soit à leur portée, pour tenter de réparer.

Je ne peux développer cela beaucoup plus, mais vous trouverez des articles concernant les cercles restauratifs, ou la justice restaurative, sur internet.

Par exemple ici :

https://cerclesrestauratifs.org/wiki/Dominic_Barter

Jean-David Roth